Le 21 avril 2002 de Dominique Sopo, président de SOS Racisme
En 2003, le militant originaire de Valenciennes est nommé président de SOS Racisme. Un an après la présidentielle qui a opposé Jean-Marie Le Pen et Jacques Chirac au second tour.
Dans les deux semaines qui précèdent la présidentielle de 2002, « on pressentait qu’il y avait un risque majeur. Les derniers sondages off montraient que les scores entre Le Pen et Jospin se rapprochaient dangereusement. Jospin ne voyait pas de risque réel, il était confiant, ne réagissait pas. Il avait gardé de l’argent pour le second tour… » Engagé auprès de l’UNEF-ID, Dominique Sopo, 26 ans, milite au Mouvement des jeunes socialistes et à SOS racisme.
« L’ambiance était surréaliste »
« Le 21 avril, je me suis rendu au local de campagne de Jospin, rue du Faubourg-Saint-Martin. L’ambiance était surréaliste, les gens assez confiants. Un peu avant 18h, des sondages –off toujours – ont commencé à tomber. On annonçait Jospin battu. J’avais cette information sous les yeux et autour de moi, dans la salle, il y avait toujours de l’ambiance, tout le monde semblait heureux… » Ne pas y croire, peut-être. « Et puis l’atmosphère est devenue de plus en plus lourde, lugubre, avec un Jospin enfermé à l’étage, qui ne s’était pas montré… »
À 20 h, heure officielle de proclamation des résultats du premier tour, le couperet tombe: Lionel Jospin obtient 16,18 % des suffrages exprimés derrière Jean-Marie Le Pen (16,86 %) tandis que Jacques Chirac est en tête avec 19,88 %. « Quand l’annonce est faite, les gens n’y croient pas, c’est la totale stupéfaction… » Le séisme est immédiat. Des milliers de Français descendent dans la rue, jusqu’au 1er mai qui réunit environ 1,5 million de personnes sur le pavé.
« Un verrou avait sauté »
« Voir Le Pen accéder au second tour– surtout quand on est anti-raciste – laissait présager qu’un verrou avait sauté. La présence d’un candidat d’extrême droite allait banaliser celle-ci dans le champ politique. C’est ce qui s’est produit. »
Au lendemain du 21 avril, le jeune socialiste refuse la gueule de bois. « Quand on est militant, on a l’obligation d’agir, de se positionner, même si c’est traumatisant. On a organisé pléthore de réunions pour mobiliser des énergies. On a eu plus de militants, mais trop peu de gens sont restés. Il y a eu un choc, un coup de tonnerre dans un ciel bleu mais ça n’a pas duré de façon massive. On est dans une société du zapping, on passe d’une émotion à l’autre... »
Plus rien à voir avec le combat des années 80
Lui a l’engagement bien ancré. Une maman socialiste, maire de La Sentinelle, commune du Valenciennois où a grandi le militant. Un père togolais venu en France pour suivre des études de mécanique et travailler dans l’industrie automobile. « En 1993, mon père se fait naturaliser car Pasqua est revenu au pouvoir (il est ministre de l’Intérieur) et Pasqua c’était déjà quelque chose… »
Un an après la présidentielle de 2002, Malek Boutih désigne Dominique Sopo comme son successeur à la présidence de SOS Racisme.
« La question de l’anti-racisme n’a plus rien à voir avec le combat des années 80. Ce n’est plus Robert contre Mohammed. On est sur des nœuds passionnels et complexes que la France ne sait pas traiter : la question du vivre ensemble, le rapport à l’Histoire… »
Le jeune agrégé d’économie accepte le défi. « On me l’avait vendu comme un bail assez court. » Ça fait douze ans.
L’article publié par Delphine d’Haenens dans La Voix Du Nord