L’histoire remonte à 2009. Fatimata*, femme de chambre à l’hôtel François 1er dans le huitième arrondissement de Paris, est embauchée en CDD. En 2012, elle cumule toujours les CDD de très courte durée. Fatimata apparaît alors comme désavantagée par rapport aux autres femmes de chambre – blanches – qui obtenaient des CDI quelques mois seulement après leur première embauche. Elle décide alors de saisir l’inspection du travail et obtient finalement un CDI.
Un an plus tard, Fatimata dénonce des faits de discrimination et des propos racistes. En effet, une cliente régulière de l’hôtel refuse catégoriquement qu’une personne de couleur noire ou d’origine africaine assure le nettoyage de sa chambre car celle-ci « pue la transpiration », selon le témoignage de Fatimata.
« Il faut que ces gens-là soient punis »
Alors qu’elle dénonce ces faits à sa direction, Fatimata est licenciée pour « faute grave » le 4 octobre 2013. La femme de chambre saisit donc le conseil de Prud’hommes de Paris en soulevant la nullité de son licenciement pour traitement discriminatoire. Le caractère discriminatoire ne sera pas retenu en première instance, seulement la nullité du licenciement.
En parallèle, dès 2013, elle contacte le pôle juridique de SOS Racisme et l’association la soutient en se constituant intervenant volontaire dans la procédure : « Je suis venue voir SOS Racisme parce que je me suis dit que c’est un problème de racisme et qu’il faut que ces gens-là soient punis. Ce genre de personnes, il y en a plein dans l’hôtellerie, il y en a plein… Donc, tant qu’on ne les a pas démasquées, ils n’arrêteront jamais », nous expliquait-elle en 2016.
L’hôtel reconnu coupable
Fatimata et SOS Racisme, représentés par Maître Antoine Goulet, ne s’arrêtent pas là et finissent par obtenir gain de cause. Fin 2018, la Cour d’appel de Paris reconnaît que Fatimata a été victime de discrimination raciale à l’embauche et lors de son licenciement. La Cour condamne donc l’hôtel à verser des dommages et intérêts à la victime. SOS Racisme se félicite de la décision rendue.
Si Fatimata a décidé d’aller jusqu’au bout de cette procédure, c’est parce qu’elle a un message à faire passer : « Ce que j’ai envie de dire aux gens dans ma situation, c’est que quand ils remarquent des problèmes de racisme, qu’ils viennent tout de suite voir les associations qui luttent contre le racisme pour régler ce problème. Il ne faut pas qu’ils attendent jusqu’à ce que ça déborde. »
L’histoire de Fatimata, comme celle des femmes de chambre – essentiellement d’origine immigrée – de l’hôtel Park Hyatt entrées en grève en octobre dernier pour faire valoir leurs droits, nous dévoilent les pratiques de certains grands hôtels, où, derrière leur façade glamour se cache un racisme débridé de la part des directions et/ou des clients envers le personnel.