Projet de loi Immigration : les propos inquiétants d’Aurore Bergé et de Yaël Braun-Pivet à quelques heures de la CMP
À la suite du vote par l’Assemblée nationale de la motion de rejet du projet de loi Immigration porté par Gérald Darmanin, la sagesse aurait voulu, comme nous le réclamions dès lundi dernier, que ce texte soit retiré par l’actuel pouvoir.
En effet, il appartenait au pouvoir de fermer la séquence délétère ouverte dans notre pays depuis l’été 2022 par ce texte présenté d’emblée par le ministre de l’Intérieur comme une réponse à l’une des grandes obsessions de l’extrême-droite (à savoir le lien supposé entre immigration et délinquance). Vouloir sauver ce texte ne peut, depuis le vote de la motion de rejet, être obtenu que par un « deal » avec une droite LR dont le glissement vers les thèses de l’extrême-droite s’est confirmé et amplifié à l’occasion des débats qui ont entouré ces derniers mois le projet de loi.
Malgré cette réalité incontournable, le gouvernement s’est engagé dans la voie de la recherche d’un accord avec LR via la convocation d’une commission mixte paritaire qui se tiendra ce jour.
Hier, dimanche 17 décembre, Aurore Bergé, membre du gouvernement, et Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, ont dessiné les concessions que le pouvoir semble considérer comme admissibles afin de faire adopter le projet de loi Immigration. Ces concessions sont graves.
En effet, les interventions de ces deux figures macronistes ont laissé entrevoir que l’accord avec LR se ferait potentiellement sur la remise en cause de deux éléments majeurs de la tradition républicaine que sont d’un côté l’égalité et, de l’autre, le droit su sol tel qu’issu de la législation de 1889.
Ainsi, le pouvoir semble prêt à accepter les deux mesures suivantes :
– le conditionnement du versement des prestations sociales aux étrangers à 3 ans de présence sur le territoire national (au lieu de 6 mois aujourd’hui). Cette mesure, qui fragiliserait par ailleurs des familles modestes, est pourtant l’un des éléments majeurs de la préférence nationale réclamée par l’extrême-droite lepéniste ces dernières décennies. Elle est à ce titre une atteinte à la conception républicaine de l’égalité, au point où le Conseil constitutionnel a, en 1990 et concernant les allocations familiales, estimé qu’une telle approche était contraire à la Constitution en ce qu’elle portait atteinte au principe d’égalité.
– la remise en cause du droit du sol par l’instauration d’une « manifestation de volonté » par les enfants nés en France de parents étrangers. Outre la suspicion qui la sous-tend à l’endroit de milliers d’enfants qui, à 18 ans, deviennent automatiquement français chaque année par le droit du sol, cette « manifestation de volonté », que la droite avait instaurée en 1993 en rupture avec la tradition républicaine, avait à l’époque produit des résultats extrêmement problématiques avant qu’elle ne soit supprimée en 1998.
SOS Racisme demande au Gouvernement de ne pas se lancer dans la voie de la remise en cause des principes fondamentaux de la République, à une heure où il est crucial que la fermeté face aux coups de boutoir de l’extrême-droite et de son idéologie soit de mise.
Si le Gouvernement persévérait dans cette voie et cherchait à obtenir un accord sur des bases aussi indignes, SOS Racisme appellerait les députés de la majorité, dont certaines et certains se sont engagés loin des rivages politiques de l’accointance avec une droite en voie de radicalisation, à voter contre un texte qui porterait atteinte aux déaux qu’ils se sont engagés à défendre en se présentant aux suffrages de leurs électeurs et qui, en légitimant des mesures venues de l’extrême-droite, contribuerait à renforcer la légitimité et la crédibilité de cette famille politique.
Contact presse : 0673069974