« Hier, Arnaud Montebourg a proposé au Grand Jury de « bloquer les transferts d’argent particuliers qui ne nous aident pas à appliquer les OQTF ». Ces propos sont très problématiques, et ceci sur plusieurs plans.
Tout d’abord, Arnaud Montebourg court manifestement après ce qu’il estime être l’air du temps, à savoir une demande de fermeté du corps électoral vis-à-vis de l’immigration. En découle chez lui une stratégie bien connue et à peu près universellement perdante : courons après nos adversaires ou nos ennemis pour ne pas leur laisser le terrain sur lequel ils prospèrent.
En outre, cette séquence traduit une nette incapacité à parler aux classes populaires qu’Arnaud Montebourg se propose de séduire et envers lesquelles, incapable de définir un projet positif, il pense donc devoir envoyer des signaux que ne renie pas Eric Zemmour. En être rendu à ce point, c’est déjà avoir perdu puisque c’est d’emblée se placer sur le seul terrain de l’adversaire ou de l’ennemi qui y sera toujours plus crédible.
Par ailleurs, si l’on peut entendre que la France doit faire respecter ses frontières et sa souveraineté, il est étrange de le faire en tapant sur les pauvres. Car qui sont les êtres concrets qui font transiter des sommes d’argent vers ces pays qui ne feraient pas droit aux OQTF délivrées par la France ? Des personnes modestes, souvent en situation régulière, qui envoient de l’argent à leurs familles pauvres. Voilà donc le projet d’Arnaud Montebourg : une punition collective frappant les pauvres ici et là-bas ?
Enfin, Arnaud Montebourg semble ignorer un point fondamental : les mesures anti-immigrées n’assouvissent en rien la haine raciste qui ne concerne pas seulement les immigrés mais bien ces populations noires et arabes qui sont désormais françaises depuis plusieurs générations. La thématique du nécessaire contrôle de l’immigration – avantageusement présentée comme une question de souveraineté à reconquérir – constitue souvent une euphémisation de l’incompatibilité de cette partie de la population française avec notre pays. À force d’avoir fait mine pendant des années de ne pas voir de quoi étaient porteurs certains débats sur l’immigration, trop de responsables politiques n’ont pas seulement chevauché ces débats : ils ont préparé le terrain à un Zemmour qui, lui, ne s’embarrasse pas d’euphémisations et affirme qu’il ne parle pas (seulement) des étrangers mais bien de ces populations porteuses d’une nationalité française qu’il leur dénie.
Face à ces stratégies qui, en plus de constituer des reniements, sont perdantes pour la gauche, la première chose à faire est de les refuser. La seconde chose est d’élaborer des alternatives réfléchies et gagnantes. Ne faire ni l’une ni l’autre de ces choses, ça n’est pas construire une « remontada ». C’est bien plus sûrement la garantie d’une « descendada » éthique dont le produit électoral serait au mieux la constitution d’un énième petit glacis électoral perdu entre la gauche, l’amoralité et le néant. »
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