Commémorer Maurras ? Non.

Charles Maurras, né il y a 150 ans, serait donc officiellement commémoré en France en cette année 2018. C’est ce qui ressort du très officiel recueil des commémorations nationales établi sous l’égide du Ministère de la Culture.

Certes, l’on pourrait se dire que commémorer n’est pas tout à fait célébrer. Mais, outre le fait que célébration et commémoration sont intimement liées dans l’esprit commun, c’est bien le sens donné par la ministre elle-même comme le montre son avant-propos au recueil susmentionné, qui commence par cette phrase : « L’intérêt grandissant pour l’histoire, le besoin d’explorer sa mémoire et le goût de la fête expliquent le succès des anniversaires et des commémorations. »

Commémorer un individu est par ailleurs le faire entrer dans le Panthéon de la légitimité nationale.

Charles Maurras mérite-t-il cet honneur ? De toute évidence, non. Mais la présentation du personnage sur le site de France Archives (la seule présentation visible du tout public) laisserait presque penser qu’il le devrait. En effet, Charles Maurras est présenté comme une « figure emblématique et controversée ». Rien sur son rejet des « quatre Etats confédérés » – c’est-à-dire les ennemis de l’intérieur constituant l’Anti-France – qu’étaient selon lui « Les juifs, les protestants, les métèques et les francs-maçons ». Rien sur sa théorisation de l’ « antisémitisme d’Etat ». Rien sur son antidreyfusisme compulsif. Rien sur son refus de l’héritage de 1789. Rien sur sa haine de la République qui lui fit voir l’effondrement de cette dernière en 1940 comme une « divine surprise ». Rien sur son soutien au régime de Vichy.

Certes, les commémorations mettent parfois à l’honneur des personnages dont la vie a pu être traversée de faits ou de pensées douteux, criminels ou scandaleux. Mais Charles Maurras ne s’est pas égaré de ci, de là, dans des idéologies antidémocratiques et antisémites. Le rejet de la démocratie et son « antisémitisme d’Etat » sont les deux principes structurants de son œuvre idéologique.

Donc, non : Charles Maurras, condamné à la Libération pour intelligence avec l’ennemi, n’est pas une figure « controversée », terme renvoyant à l’idée de la légitimité d’une « disputatio » sur les thèses énoncées.

La peine qui lui fut infligée était double : la réclusion criminelle à perpétuité et la dégradation nationale. Ne laissons quiconque opérer une opération de réhabilitation de celles et de ceux qui, par leurs écrits et leurs actions, ont contribué à assombrir le siècle dernier.

C’est pourquoi SOS Racisme demande que Charles Maurras soit retiré sans délai du recueil des commémorations nationales.

 

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Samia Chabbaoui: 06 78 01 38 09