26 propositions de SOS Racisme pour lutter contre le racisme et les discriminations raciales en France

I. Un État exigeant pour lui-même

Police

  • Sur le modèle de la commission McPherson mise en place en 1997 en Grande-Bretagne et en lieu et place de la “commission Vigouroux” annoncée par Christophe Castaner, installation d’une commission indépendante chargée, sous les 6 mois, de faire des préconisations publiques de réformes visant à lutter contre le racisme au sein des forces de l’ordre, à revoir la philosophie d’engagement de la force publique et, plus généralement, à assainir les relations entre les forces de l’ordre et la population, en s’intéressant notamment à la question du sous-encadrement des agents de police.

Sans attendre les conclusions de ladite commission :

  • Instauration d’un récépissé de contrôle. En renseignant le motif et la base légale du contrôle, ce récépissé marquera un double progrès démocratique: il contribuera à limiter le contrôle au faciès et permettra l’exercice effectif de recours contre d’éventuels contrôles abusifs.
  • Concernant les fonctionnaires de police et de gendarmerie, les enquêtes administratives liées à des plaintes de citoyens ne doivent plus être du ressort de l’IGPN et de l’IGGN, inspections partiales et largement décrédibilisées quand il s’agit d’enquêtes relevant de la relation entre des membres des forces de l’ordre et des citoyens. Hors du giron du ministère de l’Intérieur, une inspection ad hoc, formée de personnalités qualifiées, de magistrats et éventuellement d’un représentant du ministère de l’Intérieur, doit avoir la responsabilité exclusive de ces enquêtes. Cette inspection devrait également pouvoir connaître, sur la demande du plaignant, de toute autre situation relevant habituellement de l’IGPN et de l’IGGN (exemple: un policier demandant une enquête administrative à l’endroit d’un collègue ou d’un supérieur hiérarchique pour des faits de harcèlement sexuel ou de comportements racistes…).
  • Suite aux témoignages de nombreux fonctionnaires de police et de gendarmerie, réalisation d’une enquête auprès de ces deux corps afin de recueillir le ressenti du racisme subi par des fonctionnaires au sein de leur corps de métier.

 

Construire une chaîne pénale efficiente

  • Mise en place de brigades de lutte contre le racisme et les discriminations raciales au sein des unités d’investigation des commissariats (éventuellement des commissariats de district), des gendarmeries et de chaque SRPJ. Les membres de ces brigades doivent être dotés d’une solide formation.
  • Mise en place effective dans chaque parquet de référents sur la lutte contre le racisme et les discriminations raciales. Ces référents, substituts du procureur, doivent être dotés d’une solide formation.
  • Au-delà de ces personnels spécialisés, renforcement, au sein de la police, de la gendarmerie et de la magistrature, des formations sur le racisme et les discriminations raciales.
  • Automaticité de l’inscription du motif aggravant de racisme dans toute procédure judiciaire si la victime en fait la demande ou évoque la dimension raciste du délit ou du crime allégué. Il appartiendra ensuite au Parquet ou au juge d’instruction d’abandonner ce motif si rien ne venait le sous-tendre dans l’enquête.

 

Fonction publique

  • Rappel par circulaire pour tous les agents de la fonction publique de leur responsabilité dans la prévention et la lutte contre les comportements racistes.
  • Ajout de mentions explicites dédiées à la lutte contre le racisme dans le code de déontologie des agents de la fonction publique.

 

Politique pénale

  • Mise en place d’une commission de réflexion sur le traitement pénal des drogues. En effet, il n’est pas possible d’avoir une politique pénale qui procède d’une morale inapte à agir sur la consommation et qui génère une activité de facto criminelle source, notamment dans les quartiers populaires, de confrontations, de tensions, de carrières délinquantes…

 

II. Un État exigeant envers les grands acteurs de la vie quotidienne

Emploi

  • Au sein des entreprises, des référents aux questions de racisme doivent être nommés au sein des CSE, sur le modèle des référents au harcèlement sexuel et aux agissements sexistes (loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018).
  • Formation obligatoire des agents de l’Inspection du travail à la question des discriminations raciales et des propos et comportements racistes.
  • Concernant l’article 214 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté : préciser les modalités de mise en oeuvre des formations à la non-discrimination par décret en incluant l’obligation de mettre en oeuvre des formations d’une journée en présentiel avec une partie dédiée à la déconstruction des préjugés et des stéréotypes. Définition précise du contenu des formations en concertation avec les associations et les organisations syndicales.
  • Elargissement des personnels concernés par l’article 214 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017: rendre obligatoire au sein des trois fonctions publiques et dans toutes les entreprises de plus de 50 salariés la formation à la non-discrimination et à la déconstruction des préjugés auprès de tous les employés en situation de recruter, d’évaluer, de manager et pour toutes les personnes en contact du public.
  • Extension de la possibilité pour les juges de restreindre ou interdire l’accès aux marchés publics pour les entreprises condamnées pour discriminations raciales à l’embauche, au déroulement de carrière et qui ne pourraient pas faire la preuve d’une politique interne de lutte contre les discriminations raciales.
  • Création d’un fonds d’aide à l’entreprenariat en direction des habitants des quartiers populaires. Ce fonds, correctement doté, doit s’appuyer sur la mise en place d’un guichet unique identifié et résultant de la fusion des dispositifs connexes à la création d’entreprises et aujourd’hui fréquemment éparpillés (BPI, CAF, ADIE, chambres de commerce…): l’apport en capital bien évidemment, mais également la garantie de prêt, les conseils, l’aide à la gestion et au suivi comptable.

 

Logement

  • Obligation de formation des professionnels de l’immobilier à la prévention des comportements racistes, à la lutte contre les discriminations raciales et à la déconstruction des préjugés. Elaboration des contenus et des modalités de cette formation en concertation avec les acteurs associatifs. Ces formations devront nécessairement être réalisées en présentiel et aborder la question du rôle des préjugés et des stéréotypes dans les mécanismes discriminatoires.
  • Pour les sites internet des agences immobilières et des plateformes de mise en relation directe des propriétaires et des locataires, obligation d’information des utilisateurs au droit à la non-discrimination ainsi que la mise en place d’un dispositif de signalement.

 

III. Un État qui aide à renseigner le réel

Recherche

  • Financement par l’Etat de testings d’évaluation des pratiques discriminatoires dans le domaine de l’immobilier et de l’emploi afin de vérifier l’efficacité des politiques publiques mises en oeuvre dans ces domaines.
  • Au-delà des testings permettant les évaluations susmentionnées, financement des études permettant de mieux comprendre les discriminations raciales, notamment par la création d’un fond doté annuellement d’un million d’euros et dédié au financement de testings réalisées par des chercheurs et des associations.

 

IV. Un État qui contribue à apaiser les grandes passions historiques

Symboles et figures

  • Création d’un comité de réflexion sur les symboles républicains et les figures honorées par la République qui apparaissent dans l’espace public ou les lieux de la République. Ce comité ferait des propositions sur l’ajout de figures représentatives de notre histoire ainsi que sur la suppression ou l’ajout d’explication pour certaines figures porteuses de l’Histoire du racisme, de l’antisémitisme ou de l’esclavage.

 

Histoire

  • En complément essentiel au mémorial des noms qui sera installé prochainement dans le jardin des Tuileries, création d’un musée de l’Histoire de l’esclavage au sein de l’Hôtel de la Marine à Paris.

 

V. Un État qui croit en sa jeunesse

Education

  • Pour tout élève, financement par l’Etat de séjours linguistiques, culturels ou de découverte (de 6 à 8 jours): pour les établissements ZEP, 1 séjour en maternelle, 3 séjours en primaire et 4 séjours au collège. Pour les établissements hors-ZEP: 1 séjour en primaire et 2 séjours au collège. Pour les lycées, il s’agirait de garantir 2 séjours pour les lycées professionnels et 1 séjour pour les lycées généraux et technologiques. Ces financements ne doivent en aucun cas mettre en péril ceux déjà existants sur les séjours et activités artistiques et culturelles.

 

Enseignement supérieur

  • Dans toutes les formations supérieures ouvrant la voie à des carrières professionnelles en lien avec le management, intégration obligatoire de modules dédiés à la lutte contre le sexisme, le racisme, l’homophobie, à la prévention des discriminations et à la déconstruction des préjugés. Sont notamment concernées les formations dispensées par les écoles de commerce, les écoles d’ingénieurs, les IEP, les écoles de la fonction publique…

 

VI. Un État qui fait progresser la citoyenneté

Citoyenneté

  • Depuis le vote du Sénat du 8 décembre 2011, les deux chambres ont adopté un projet de révision constitutionnelle ouvrant la voie au droit de vote des étrangers aux élections municipales. Il appartient à l’Etat d’achever ce processus afin de rendre ce droit effectif.