25 décembre 2006 : James Brown is not dead !
Fin décembre 2006, des milliers de personnes, célèbres et anonymes, se pressent au cœur d’Harlem dans l’Apollo Theater, la salle mythique de la musique noire américaine.
Qui viennent-ils écouter ? Personne. Les gens défilent devant la dépouille de celui qu’une pneumonie a emporté le 25 décembre 2006, à l’âge de 73 ans. Connu comme le « Godfather of Soul », « Mister Dynamite » ou « The Hardest Working Man in Show Business », c’est sur cette scène de l’Apollo Theater que James Brown acquit sa célébrité. Plus de 40 ans en arrière, c’est de ce lieu qu’émergea le « Live at the Apollo », un enregistrement survolté et éblouissant aussi bien sur le plan musical que sur celui de la danse.
Pourtant, rien ne semblait destiner James Brown à la gloire. Né le 3 mai 1933 dans une famille pauvre de Caroline du Sud, il plonge dans la délinquance durant son adolescence. Incarcéré entre 1949 et 1952 suite à un braquage, il rencontre Bobby Byrd en 1952 à la faveur d’un match de baseball entre l’équipe de la prison et une équipe de l’extérieur. Les deux jeunes noirs se lient d’amitié.
Lorsque James Brown sort de prison, il intègre alors le groupe de R&B et de soul de Bobby Byrd (The Avons) et y prend une place grandissante. Le groupe est rebaptisé « The Famous Flames », puis « James Brown with the Famous Flames ». Le succès est rapidement au rendez-vous avec le hit « Please, please, please » (1956) puis l’album « Night Train » (1961), caractéristique de ce qui sera la marque de fabrique de James Brown : des titres au rythme rapide et dégageant une très forte énergie. Ce R&B électrisé ne l’est pas que dans la musique mais également par les performances scéniques de James Brown, véritable bête de scène. Live at the Apollo (1963) – qui assure à James Brown un statut de star aux Etats-Unis – et la performance de ce dernier au T.A.M.I Show (1964) constituent des sommets scéniques de la carrière de l’artiste.
Enchaînant les succès les années suivantes (Papa’s got a brand new bag, I Feel Good, It’s a Man’s Man’s Man’s World…), James Brown évolue vers un nouveau style de musique inauguré par Cold Sweat (1967). Le parlé et le rythme deviennent de plus en plus saccadés, tandis que les instruments occupent désormais une place prédominante : c’est la naissance du funk.
La musique de James Brown, qui s’était soigneusement tenu en dehors du mouvement des droits civiques (trop individualiste pour participer à un mouvement collectif analyseront certains), devient plus revendicative. En 1968, en pleine naissance du Black Power, Brown chante « I’m Black and I’m Proud » (« Je suis fier d’être noir »), tandis que ses titres des années qui suivent s’intéressent beaucoup plus aux thèmes sociaux … sans oublier une place de choix laissée à la sexualité (« Sex Machine » en 1975). De cette époque et par le lien entre le funk et la disco, James Brown en tirera le surnom auto-attribué « The original disco man ». Dans les années 1980, l’activité musicale de James Brown diminue fortement. Une apparition dans le film « The Blues Brothers » en 1980 et son interprétation de « Living in America » (B.O du film Rocky IV) en 1985 le font désormais apparaître comme un artiste beaucoup plus grand public. C’est dans cette décennie 1975-1985 qu’une foule d’artistes reconnaît l’influence exercée par James Brown sur eux. Il ne dédaigne d’ailleurs pas de mettre en scène les jeunes artistes noirs qui sont en quelque sorte ses successeurs. C’est ainsi qu’en 1983, Mickaël Jackson et Prince font une apparition remarquée à un concert de James Brown. A la fin des années 1980, James Brown semble renouer avec ses démons en faisant davantage la Une des chroniques judiciaires que des charts musicaux. Divers délits le conduiront en prison entre 1988 et 1991. Les dernières années de sa vie seront celles d’un artiste respecté et reconnu, qui continuera à organiser régulièrement des concerts à travers le monde tout en devant suivre à plusieurs reprises des cures de désintoxication.
Le talent de James Brown en fait un des principaux « performers » musicaux du 20ème siècle et un monument de la musique noire américaine. Quant à l’influence de James Brown sur des générations entières d’artistes de jazz, soul, R&B, funk, disco, rock, rap, elle a été telle que le talent de James Brown continue à agir. Donc, décidément, non : James Brown is not dead !