6 février 1945 : naissance de Bob Marley, un chanteur engagé pour l’égalité

Né le 6 février 1945, Bob Marley est le premier ambassadeur et l’inventeur du reggae moderne, un proche et riche dérivé du rhythm & blues, de la soul américaine et de musique noire jamaïcaine. Roi incontesté de ce mouvement musical majeur issu des ghettos noirs et pauvres de Kingston, Bob Marley n’a eu de cesse de porter à la lumière les combats de son peuple, les espoirs et souffrances, l'amour, les aspirations à la liberté et à l’égalité des enfants de Jamaïque et d’Afrique.

 

 

Bob Marley a composé des sons mythiques avec une voix écorchée , un peu voilée, qui traversent les générations, les barrières sociales et les frontières, des mélomanes ou non, même des plus réfractaires aux sonorités rastas. Bob Marley a fait connaître et aimer le reggae au monde entier. Une musique envoûtante, suave, mais militante, aussi. Il en est devenu l’icône ainsi que le porte-parole des défavorisés dont il fallait hisser le drapeau avec un cri, doux mais de révolte, contre la misère et l’oppression. Il fera du reggae son arme pacifique, un langage universel, qui se mélangera lui-même à d’autres, plus tard. Le dub et le ragga en sont issus directement. Le hip hop et le rap y puisent quelques unes de leurs origines.

« Roi incontestable du reggae, ce genre musical afro-caribéen né à la Jamaïque et qu’il a propagé sur les cinq continents au cours de sa carrière, Bob Marley devint la première star musicale planétaire issue du tiers-monde. Son œuvre témoigne de ses qualités d’homme de paix et de justice, de défenseur des opprimés, de héraut anticolonialiste et plus particulièrement du continent noir. Fervent rastafari, c’est-à-dire adepte du courant chrétien qui considère feu l’empereur éthiopien Hailé Sélassié comme le nouveau Messie, il arborait des « dreadlocks » et fumait religieusement la « ganja ». » (extrait d’un article de The Independant, de janvier 2005)

Bob Marley (Robert Nesta Marley) est né le 6 février 1945 à Nine Miles, un hameau situé près de Sainte Anne (Jamaïque). Son père (Norval Sinclair Marley) était un officier de la marine anglaise et sa mère (Cedella Ciddy Malcom) était une jamaïcaine vivant à Rhoden Hall. Il a très peu connu son père. Adolescent, il s’installe avec sa mère à Trench Town (à l’ouest de Kingston). Il commence à s’y produire en 1959.

Construit en 1951 après un cyclone, ce secteur de Kingston est le théâtre d’affrontements armés, mais il est aussi un creuset culturel, une ruche pour musiciens et Rastas. Marley, qui y vit dans la misère, mais y a rencontré ses futurs confrères Bunny Livingston Wailer, Peter Tosh, ainsi que son premier mentor musical Joe Higgs. Dès lors, il y peaufinera presque à l’infini les centaines de chansons qui feront son succès bien des années après, notamment après sa rencontre avec un producteur, Chris Blackwell, un Jamaïcain, propriétaire du label Island Records à Londres, absolument décidé à « vendre » Bob Marley et les Wailers aux USA comme le premier groupe de rock noir. Catch a Fire puis Burnin’ sortent chez Island sous le nom des Wailers en avril et octobre 1973.

Parmi les influences moins connues qui ont également façonné la carrière et l’œuvre de Marley, on compte également Johnny Nash, chanteur pop américain qui “découvre” Bob Marley en 1968 à Kingston lors d’un grounation (un rassemblement religieux Rasta) et le signe aussitôt sur son label, JAD Records, puis l’embarque en Suède et en Angleterre. Il y initialement méprisé par les fans de rock. Mais du Ska au Rocksteady, le légendaire rastaman a fini par conquérir les scènes du monde entier.

Le Live ! enregistré le 18 juillet 1975 à Londres, contient son premier succès international : No Woman No Cry, où il console une femme affectée par la violence des ghettos. Rastaman Vibration, en 1976, sera le disque de Bob Marley le plus vendu de son vivant, et son premier succès américain.

Né d’une union “illégitime” entre un capitaine Blanc cinquantenaire et une jeune noire, Bob Marley a dès sa naissance incarné une confrontation historique et sociale encore difficile à aborder alors dans sa Jamaïque natale : la rencontre entre l’Afrique, le poids de l’esclavage et la domination coloniale.

Bien avant que la mondialisation ne soit pensée, analysée ou contestée, Bob Marley a été l’un des premiers artistes à évoquer les « déplacements de peuples et de matériaux», l’oppression d’un système unique qu’il appelle « Babylone ».

Comme avant lui Martin Luther King et autres militants de l’égalité, il deviendra la cible des mouvements d’extrême droite américains et le 3 décembre 1976, il est victime d’un attentat à son domicile par 6 hommes armés qui déclenchent une fusillade. Touché de cinq balles, pendant que sa femme est blessée d’une balle dans la tête, il assurera pourtant son concert prévu deux jours plus tard et il dira à propos de sa présence : “Les gens qui tentent de rendre ce monde mauvais ne prennent jamais de congés. Comment le pourrais-je?”

Toujours sur scène, Marley réussit à réconcilier deux opposants politiques légendaires en Jamaïque, à l’issue de huit heures d’un concert culte, le One Love Peace Concert, le 22 avril 1978, au stade de Kingston, date coïncidant avec le douzième anniversaire de la visite officielle de Hailé Sélassié en Jamaïque. Les artistes s’opposaient à la guerre civile que subissait le pays. Lors de ce concert, Bob Marley joignit les mains de Michael Manley et de Edward Seaga – deux adversaires politiques – lors d’une extraordinaire interprétation de son tube Jammin’. Deux mois après ce concert, il reçut la Médaille de la Paix à l’ONU. Sans jamais renier l’inspiration de Marcus Garvey (adepte du retour des Noirs américains en Afrique), ni sa dévotion pour l’Empereur Hailé Sélassié (Ras TafarI). Ceux qui ont eu la chance d’assister à l’un de ses concerts, en parle comme des heures de pure magie.

Bob Marley est mort d’un cancer généralisé à Miami le lundi 11 mai 1981. Il avait 36 ans. Il est enterré à Nine Miles. Ce décès eut un retentissement international. Ses funérailles furent nationales. Toute la classe politique jamaïquaine s’y rendit. Edward Seaga, le patron du JLP (Jamaican Labour Party, de droite) fraichement élu Premier ministre, Michael Manley, le leader du PNP (People National Party, gauche socialiste). Ce dernier fut ovationné : il venait de gouverner le pays de 1972 à 1980, et avait reçu le soutien implicite de la quasi-totalité des chanteurs de reggae, Marley en tête, comme du mouvement rasta, au moins au début de son mandat… En revanche, pas un seul représentant célèbre du mouvement rasta n’assistera à ces funérailles. Peter Tosh et Bunny Wailer sont absents. Pour les disciples du Négus, qui ne croient qu’à la vie, la mort est une illusion.

En 1976, « Time Magazine » écrivait: « Bob Marley est la superstar de la Jamaïque. Il rivalise avec le gouvernement comme force politique. » A une question d’un journaliste, à propos de son dernier disque « Uprising » (soulèvement), qui lui demandait quel en était le thème central, il répondit : « La conscience. L’élévation du niveau de conscience. »

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