Assassinat d’Hervé Gourdel : les djihadistes ne nous diviseront pas

Ce 24 septembre, Hervé Gourdel a été assassiné par des criminels se revendiquant de l'Etat islamique, groupe terroriste à la terminologie usurpée. Homme simple et ouvert, Hervé Gourdel a eu le malheur de rencontrer la route de bandits sanguinaires dont le moteur et la stratégie doivent être dénoncés sans ambiguïté.

Leur moteur, c’est la recherche d’une pureté dont ils auraient les clés et qui, comme toute logique de pureté, se traduit par l’élimination sans fin des membres de sociétés qu’il s’agit de purifier par le sang. Chrétiens d’Irak et de Syrie, yézidis, juifs, musulmans insuffisamment intégristes ou trop peu jihadistes, Kurdes, occidentaux, blancs, noirs… Les cibles se multiplient sans fin et les crimes se perpétuent sans terme.

Leur stratégie, c’est celle qui consiste à rendre les ponts et les dialogues impossibles entre les peuples et les civilisations. Que cherchent en effet à signifier ces assassins à travers leurs actes macabres à la mise en scène funeste ? Ceci : « Regardez, Occidentaux, comment nous sommes, nous les musulmans. » Qu’attendent en retour ces gens chez lesquels la qualité d’occidental et celle de musulman semblent s’exclure ? Que lesdits Occidentaux se disent : « Voici comment sont les musulmans. Nous devons nous en protéger en les frappant collectivement. » Le terrorisme n’est ainsi pas uniquement une intimidation mais une gigantesque entreprise de séparation haineuse et d’incommunicabilité guerrière.

Aujourd’hui endeuillée, notre nation pourrait voir – cela a d’ailleurs déjà commencé – se mettre en mouvement les racistes qui trouvent dans ces actes la justification de leurs pensées abjectes. Mais il faut le dire, nos paroles fussent-elles alors recouvertes par les cris de celles et de ceux qui ne veulent pas entendre : les musulmans ne sont pas collectivement responsables des méfaits de ceux qui se réclament de l’Islam pour répandre la mort. Breivik n’est pas la quintessence du Norvégien. Milosevic n’est pas la substantifique moelle du Serbe. Le djihadiste n’est pas l’ontologie du musulman.

Se laisser aller à ce penchant serait une erreur de perspective, une trahison et une aberration.

Une erreur de perspective car ce serait ne pas voir que les victimes du djihadisme sont aussi les musulmans. Ne voit-on d’ailleurs pas ce que cet assassinat d’Hervé Gourdel a produit comme résurgence des années 1990 dans une Algérie encore meurtrie par les crimes des intégristes ?

Une trahison envers la mémoire d’Hervé Gourdel dont on imagine sans mal qu’il appréciait aussi les montagnes de Kabylie pour les gens qu’il y rencontra et qui aujourd’hui éprouvent – à tort – la honte de ceux dont la fierté a été blessée pour n’avoir su veiller sur celui qui aimait leur contrée.

Une aberration enfin car cela reviendrait à être les agents de ces djihadistes. Lutter contre des djihadistes en participant à la mise en œuvre de leur programme, voilà bien la dernière chose que l’intelligence humaine commande de réaliser. Que redoutent le plus au monde les djihadistes ? Que la fraternité résiste à leur entreprise.

Pour toutes celles et tous ceux qui refusent que les djihadistes nous divisent, nous nous rassembleront dimanche 28 septembre 2014 à 14h30 Place de la République à Paris

Premiers signataires de l’appel : Dominique Sopo (Président de SOS Racisme), Ibrahim Sorel Keita (Président de Banlieues Diversité Médias TV), Benjamin Stora (Historien, Président de la Cité de l’immigration), Hassan Chalgoumi (Président de la conférence des Imams de France), Ghaleb Bencheikh (Président de la conférence mondiale des religions pour la paix), Asma Guenifi (Présidente de Ni Putes Ni Soumises), Martine Aubry (Maire de Lille), Bernard-Henri Levy (Philosophe), Pierre Laurent (Secrétaire National du Parti Communiste Français), Corinne Lepage (Ancienne ministre, Présidente de CAP 21), David Gakunzi (Président d’IREA – Maison de l’Afrique), Jacques Béres (Médecin), Jean-Vincent Placé (Sénateur EELV de l’Essonne), Chantal Selva (Présidente de l’IFRAV), Marek Halter (Écrivain), Marie-Anne Chapdelaine (Députée PS d’Ille et Vilaine), Marlène Schiappa (Mouvement des élus de France pour l’égalité), Nader Alami (Animateur Producteur), Nathalie Goulet (Sénatrice UDI de l’Orne), Nawak (Dessinateur), Patrick Pelloux (Médecin urgentiste), Phillipe Coen (Initiative de prévention de la haine), Pierre Henry (Secrétaire Général de FTDA), Radu Mihaileanu (Cinéaste), Romain Blachier (Adjoint au Maire de Lyon), Rodrigo Arenas (Président de la FCPE 93), Stéphane Gatignon (Maire de Sevran), Tahar Ben Jelloun (Écrivain), Tarek Oubrou (Recteur de la Mosquée de Bordeaux), Yamina Benguigui (Ancienne ministre, réalisatrice), Yann Moix (Écrivain), Yvan Attal (Cinéaste), Virginie Votier (présidente de générations engagées), Pascal Blanchard (historien), Pierre Bergé (Président de la Fondation Pierre Bergé Yves Saint Laurent), Adil Jazouli (Sociologue), Bernard Amsalem (Président de la Fédération Française d’Athlétisme), Rama Yade (Ancienne Ministre), Julien Bayou (Porte-parole d’EELV), Fodé Sylla (ancien président de SOS Racisme), Colombe Brossel (adjointe à la maire de Paris), Guillaume Denoix de Saint-Marc (Président de l’Association française des victimes du terrorisme), Patrick Klugman (adjoint à la maire de Paris), Najet Mizuni (Professeur des universités), Sacha Reingewirtz (Président de l’UEJF), Nadège Abomangoli (Conseillère Régionale IDF), Rémi Féraud (Maire du 10ème arrondissement de Paris).